Mathieu Menegaux est de retour en librairie avec Femmes en colère depuis le 2 mars. Un roman encore une fois percutant dans lequel j’ai retrouvé la plume au scalpel de l’auteur. Ici, il dissèque les arcanes de la justice et plus précisément le fonctionnement de la Cour d’Assises et les jurés. Femmes en colère sur fond de justice, voilà un thème passionnant.
J’ai adoré Femmes en colère de Mathieu Menegaux. J’ai particulièrement apprécié la précision des faits qui sont décrits. Tout est finement décortiqué et très juste. L’auteur ne laisse aucune place aux approximations et c’est ce qui m’a plu.
Quand j’étais journaliste en presse généraliste, j’ai suivi à plusieurs reprises des procès à la Cour d’Assises. Je me souviens de la tension palpable décrite par Mathieu Menegaux parmi les personnes convoquées pour faire peut-être partie du jury. J’entendais des soupirs quand, finalement, certaines quittaient l’enceinte du tribunal, soulagées de ne pas avoir été retenues.
Dans les coulisses d’une Cour d’Assises
Et nul doute également que les personnes retenues sentaient alors peser sur leurs épaules une lourde responsabilité, celle de contribuer à décider ou non de la culpabilité et de la lourdeur de la peine.
Femmes en colère met la justice et son fonctionnement en France au coeur du roman. Et ce livre constitue avant tout un formidable hommage aux femmes.
Alors personnellement, j’ai évidemment étudié à l’époque puis que cela faisait partie de mon métier le fonctionnement d’une Cour d’Assises. Pourtant la plupart d’entre nous ignorent ce qu’il s’y passe réellement. Dans Femmes en colère, Mathieu Menegaux vous emmènent dans les coulisses d’une décision de Cour d’Assises.
Il dissèque le fonctionnement de cette institution, le poids et le pouvoir des magistrats, l’autorité qu’ils dégagent face à un jury.
La colère des femmes face à la justice
Femmes en colère permet aussi de bien décrire la justice en France dans une Cour d’Assises et il replace ce modèle de justice française dans les esprits quand la télévision ou le cinéma mettent bien plus souvent en scène un modèle très américanisé et qui n’a finalement rien à voir avec les procès d’Assises ici.
Il est évident que son roman est le fruit d’un important travail de documentation et pour avoir échangé avec l’auteur, je sais qu’il a été nourri dans ses recherches par des sources plus que fiables et expérimentées. C’est ce qui me plaît dans son travail et dans son roman : la justesse et la précision du propos, servis par cette fameuse écriture au scalpel.
Femmes en colère, c’est aussi la comparution d’une femme en cour d’Assises qui a décidé de se faire justice elle-même. Elle a été victime d’un viol abominable et a décidé de punir ses agresseurs. Etait-elle une autre à ce moment-là ? Le roman pose la question de l’aliénation mentale et donc de la responsabilité devant la justice.
Les discussions entre les membres du jury concernent la femme et sa place dans la société. Le regard porté sur une femme qui assume sa liberté sexuelle. La différence que la société fait entre un homme et une femme, célibataire assumant ses désirs et sa liberté.
Le regard de la société sur les femmes
Derrière chaque membre du jury, Mathieu Menegaux dresse le portrait de la société actuelle. Les préjugés, les idées, la rapidité à cataloguer un comportement… C’est fascinant et tellement réaliste !
Mathieu Menegaux raconte à son lecteur deux histoires en parallèle : la vie de Mathilde Collignon, la femme qui comparaît devant la Cour d’Assises par la voix de la narratrice et les débats à huis clos au coeur de ce jury.
Circonstances atténuantes ou pas ?
Femme ou homme, chacun oscille entre raison et émotion, compassion ou insensibilité… Certaines et certains jurés sont surs de leur position. D’autres semblent moins déterminés. Dilemme difficile quand il s’agit de décider de l’avenir d’une femme, maman de deux petites filles. Doivent-ils être intransigeants, parviendront-ils à qualifier avec précision les faits pour ensuite déterminer une peine ?
Mathilde est une femme de notre époque : libre, indépendante, actrice de ses décisions et de ses choix. Dans l’attente du verdict, isolée, elle remonte le fil du temps et raconte les faits tels qu’elle les a vécus. Elle sait qu’elle commis quelque chose d’irréparable mais elle l’a fait pour mettre en lumière un acte abominable également. Cette femme revendique son statut de femme et son droit à disposer de son corps en toute liberté et c’est précisément ce qu’on lui reproche.
Femmes en colère évoque évidemment l’effet Metoo, les violences faites aux femmes. Ici l’auteur donnera parole aux femmes.
Femmes en colère en quête de justice
Mathieu Menegaux accorde de l’importance à bien définir la légitime défense, la culpabilité, la torture, un acte de barbarie, le statut de victime… Et finalement son roman met le doigt sur l’abysse qui peut exister entre opinion publique et populaire et le système judiciaire et ses règles.
Femmes en colère est donc un roman magistral, une nouvelle claque pour le lecteur mais une claque nécessaire pour certains probablement. Je n’ai qu’un conseil : foncez en librairie et faites-vous votre propre idée. Jusqu’où iriez-vous si la justice ne répondait pas comme vous l’estimez juste ?
Quatrième de couverture
Cour d’Assises de Rennes, juin 2020, fin des débats (auxquels le lecteur n’a pas assisté) : le président invite les jurés à se retirer pour rejoindre la salle des délibérations. Ils tiennent entre leurs mains le sort d’une femme, Mathilde Collignon.
Qu’a-t-elle fait ? Doit-on se fier à ce que nous apprennent les délibérations à huit-clos, ou à ce que révèle le journal que rédige la prévenue qui attend le prononcé du jugement ?
Accusée de s’être vengée de manière barbare de deux hommes ayant abusé d’elle dans des circonstances très particulières, Mathilde Collignon ne clame pas son innocence, mais réclame justice.
Son acte a été commenté dans le monde entier et son procès est au cœur de toutes les polémiques et de toutes les passions.
Trois magistrats et six jurés populaires sont appelés à trancher. Doivent-ils faire preuve de clémence ou de sévérité ?
Vont-ils privilégier la punition, au nom des principes, ou le pardon, au nom de l’humanité ? Avoir été victime justifie-t-il de devenir bourreau ?
Nous plongeons en apnée dans cette salle des délibérations d’un jury de cour d’assises. Neuf hommes et femmes en colère qui projettent sciemment ou inconsciemment sur l’écran de cette affaire le film intérieur de leur propre existence…
La fiche du livre
En version papier ou numérique
- 3 mars 2021
- Éditions Grasset
- 133 x 205 mm
- 198 pages