Une légère victoire d’Odile d’Oultremont est un roman qui vous frappe en plein coeur. J’aime la plume délicate avec les mots justes de cette auteure depuis ses débuts. Découvrir Nour et Yarol Ponthus m’a enchantée.
Une légère victoire d’Odile d’Oultremont est un roman absolument magnifique. J’ai appris à connaître au fil des pages Nour, cette jeune femme qui aurait pu être journaliste et qui se satisfait d’un job d’assistante à la rédaction du Monde.
Très lucide sur son existence, elle n’ignore pas qu’elle évolue via son compagnon dans un monde qui n’est pas le sien. On se charge régulièrement de le lui rappeler. Elle doit ne faire aucune vague, rester en-dessous des radars, à tous égards pour ne surtout pas nuire à la réputation et à l’image de son beau-père, ministre…
Oui mais voilà qu’elle renverse accidentellement une jeune femme qui décède. La vie de Nour bascule. Elle ne parvient pas à oublier les images de ce drame, cette vie qu’elle a ôtée. La culpabilité la submerge même si elle n’a pas été poursuivie en justice. La jeune femme victime avait traversé en dehors du passage piéton… Peu importe, Nour se noie dans la culpabilité et survit tant bien que mal.
Un légère victoire : questionnement sur la culpabilité ?
De son côté, Yarol Ponthus purge une longue peine. Voilà 25 ans qu’il est incarcéré et n’est qu’à quelques mois d’être libéré. Il espère connaître enfin sa fille, une jeune femme qu’il ne voit jamais depuis son incarcération. Une enfant qu’il a laissée bébé à sa mère et qu’il n’a pas vu grandir, dont il ne connaît finalement que bien peu de choses.
Dévasté, il apprend alors qu’elle est décédée accidentellement. La rage le submerge et il veut connaître l’identité du chauffard qui a tué sa chair. Il aimerait se venger car bien que prisonnier exemplaire en vue d’une libération prochaine, il n’a désormais plus rien à perdre.
Nour et Ponthus. Rien ne prédestinait ces deux-là à se croiser et pourtant… l’existence de l’un entre en collision avec l’autre de manière brutale. L’écriture de l’auteure est fine et dessine lentement la personnalité de l’un et de l’autre. Elle esquisse progressivement ce qu’est leur vie.
Le désir de vengeance
Puis Odile d’Oultremont fait cheminer son lecteur sur leur retour à la vie. Ponthus qui était « rangé » des conneries imagine le pire pour venger sa fille.
Nour accepte de le rencontrer dans sa prison car elle a besoin d’être pardonnée. Et puis si cette jeune femme n’était pas morte à cause d’elle mais s’était suicidée. Voilà qu’une autre explication pourrait exister dans ce drame.
Une légère victoire dessine l’existence complexe de deux êtres, rongés par la culpabilité mais pas pour les mêmes raisons. On apprend à connaître l’un et l’autre au fil des pages et l’on comprend que l’origine sociale détermine bien des destins.
Que ne ferait-on pas pour protéger les siens ? Voilà ce que dit Ponthus sans jamais en toucher un mot à la mère de sa fille qui le détestât au point de ne jamais pardonner et ne pas lui faire connaître sa fille…
Odile d’Oultremont a écrit un roman magnifique sur des êtres déchirés. Je vous le recommande !
4e de couverture Une légère victoire
» C’est ahurissant à quel point une phrase, une seule, constituée des mêmes mots, en tous points pareils, a suffi à rendre à Nour son monde entier et à faire éclore en Ponthus les prémices d’une vérité dont aucun parent ne voudrait. «
Chacun à sa manière, Nour Delsaux et Yarol Ponthus sous-vivent. L’une est enfermée dans une existence où elle se satisfait de petits arrangements avec elle-même, l’autre est écroué depuis un quart de siècle dans une cellule de huit mètres carrés.
En février 2020, dans d’étranges circonstances, la trajectoire de l’un percute celle de l’autre.
La fiche du roman
- 2 mars 2023
- Julliard
- 140 x 200 mm
- 256 pages