Désir noir d’Anne-Sophie Jahn est un formidable travail d’enquête journalistique. Un récit passionnant et j’ai évidemment été saisie par ce que j’ai lu. Je me souviens combien j’avais été glacée au cours de l’été 2003 en apprenant le décès de Marie Trintignant.
J’ai des souvenirs très nets de la sidération dans laquelle j’étais en lisant ce qui était arrivé à Marie Trintignant lors de ce sinistre été 2003 pour elle et sa famille. Sidération, stupeur, les mots ne sont guère assez forts pour décrire ce que je ressentais car je suis de cette génération qui a connu les heures de gloire de Noir Désir.
Bref, j’ai lu à l’époque dans les médias comme tout le monde, le récit glaçant des dernières heures de cette actrice un peu mystérieuse et saisissante, au regard magnétique.
Désir noir, le récit d’un féminicide
Il est des faits divers qui vous marquent et celui-là en fit partie pour moi. Le mot féminicide n’existait pas encore. Mais déjà on avait compris qu’une passion amoureuse destructrice et nocive avait détruit la vie d’une femme, avait ravagé la vie de ses enfants, détruit à tout jamais l’existence de ses proches. C’était violent rien qu’avec les mots et rien qu’avec ce que l’on devinait des coups qu’elle avait encaissés et subis avant de succomber.
On ne juge pas les couples. Nul ne sait en effet ce qui se passe réellement entre deux êtres une fois la porte refermée. Mais jamais, ô grand jamais, l’amour ne doit conduire à cette violence inouïe et mortelle.
Les violences physiques tout autant que verbales restent inacceptables. La violence sous toutes ses formes d’ailleurs ne devrait jamais exister entre deux êtres qui disent s’aimer. Elle ne devrait même jamais être tolérée. Cette violence est l’anti-chambre du pire, une glissade vers l’acte irrémédiable.
Violences conjugales
Anne-Sophie Jahn a écrit un récit glaçant, elle a tout finement décortiqué, les faits d’abord, les personnalités également. Désir noir, c’est une enquête fouillée et passionnante. J’admire son travail. Elle retrace avec une plume exceptionnelle cette tragédie de l’été 2003, ces tragédies au pluriel. Certes le livre est accompagné d’une manchette avec le visage de Marie Trintignant mais Anne-Sophie Jahn s’intéresse aussi à Kristina Rady qui fut elle aussi la femme de Bertrand Cantat et victime de violences insoutenables.
Dans ce récit, elle retrace l’amour, la passion, la destruction, la manipulation, la déraison. Son enquête est riche de témoignages et c’est vraiment un livre que je vous recommande chaudement. Pas de parti pris, pas d’accusation, simplement des faits analysés finement et précisément. Bref un magnifique travail journalistique et d’auteure.
4 de couverture Désir noir
« Un après-midi d’automne, assise à la terrasse d’un café, je listais avec mon éditeur des idées de chapitre pour Les Sept Péchés capitaux du rock, titre de mon premier livre. “Bertrand Cantat.” Un coup de vent glacé m’a fait frissonner. Ou était-ce ce nom, évocateur de mort et de violence ?
Dans mon souvenir, le chanteur de Noir Désir s’était disputé avec sa petite amie, l’actrice Marie Trintignant, un été, en Lituanie. Il lui avait donné une gifle, sa tête avait heurté un radiateur, hémorragie cérébrale, elle n’avait pas survécu. C’était un accident, mais il relevait bien de la colère, puisqu’il était l’issue tragique d’une bagarre.
En rentrant chez moi, j’ai commencé par rechercher des articles de presse relatant l’affaire. Les titres ont défilé. Je cliquais, lisais, ou plutôt dévorais les informations. Je m’étais totalement trompée. La mort de Marie Trintignant n’était pas un accident. Et si elle n’était pas la seule victime ? »
Vingt ans après la mort de Marie Trintignant, Anne-Sophie Jahn mène l’enquête sur une tragédie que l’on n’appelait pas encore féminicide.
La fiche du récit
- 15 mars 2023
- Flammarion
- 130 x 200 mm
- 224 pages
Sur le thème des violences conjugales et le féminicide
- 125 et des milliers, le recueil bâti par Sarah Barukh
- Ceci n’est pas un fait divers de Philippe Besson
- Une simple histoire de famille d’Andréa Bescond