Puisque le soleil brille encore de Sarah Barukh est tout simplement poignant. Un magnifique roman sur la quête d’identité, la parentalité, la maternité. Puisque le soleil brille encore nous emporte dans un voyage entre la France et l’Argentine, sur fond d’Histoire. Une page sombre et difficile de ce pays dans un roman fort bien documenté.
L’auteure n’a décidément pas son pareil pour ne jamais rester dans une zone de confort en terme d’écriture. D’un roman à l’autre, elle explore des thèmes différents et surtout ses histoires sont toujours ancrées sur un fond de réalité historique.
Elle documente minutieusement ses écrits de façon à vous emporter dans un nouvel univers à chaque roman.
Dans Puisque le soleil brille encore, Sarah Barukh construit son histoire en évoquant un pan de l’Histoire d’Argentine, plutôt méconnu et très sombre. J’ai particulièrement apprécié les passages qui sont consacrés à cette partie du roman car j’étais curieuse d’en apprendre davantage sur cette période en Argentine. L’auteure a d’ailleurs vraiment bien documenté son roman, ce qui le rend encore plus addictif et dote l’histoire d’un vrai atout.
Puisque le soleil brille encore et un côté sombre
Ce roman c’est aussi le portrait d’une femme tout entière dévouée à son travail, au détriment de sa fille et de sa vie amoureuse. Brillante avocate, implacable dans son métier, elle fait penser à un bourreau de travail. C’est aussi le roman d’une femme à la recherche de son identité.
Sophie, personnage principal de Puisque le soleil brille encore, est donc une femme qui se réalise par un travail acharné. Elle ne compte pas ses heures et s’oublie très certainement au passage. Elle vibre d’une soif de justice inextinguible et fonctionne avec une exigence immense envers elle-même mais également envers ses collaborateurs.
Sophie sacrifie absolument tout à sa carrière d’avocate… Même sa fille de 9 ans qui a parfaitement compris comment se débrouiller sans sa maman… Pourtant elle passe ainsi à côté de l’essentiel.
Dans sa vie, deux piliers : son travail et son père adoré. Oui mais voilà, un soir, elle reçoit un coup de téléphone et sombre car son père est hospitalisé. Il est très malade et ne se relèvera pas. Son roc s’effondre. Un roc depuis l’enfance quand elle se sentait mal-aimée, rejetée par sa mère et sa soeur.
La figure paternelle, un roc
Un roc qu’elle admire par-dessus tout et qui va s’effacer de sa vie. Cette figure du père est omniprésente dans l’existence de Sophie. Elle l’admire aussi pour le parcours de vie qu’il lui a raconté. Une vie qui l’aurait conduit de l’Espagne à la France, à reprendre des études et finalement devenir magistrat. Quand son père meurt, Sophie s’effondre complètement et ne sait plus à quoi se raccrocher.
Vient ensuite le moment de vider l’appartement des parents puisque sa mère vit en institution depuis de nombreuses années, sans plus jamais parler…
Et là, le roman prend une nouvelle tournure puisque Sophie découvre des passeports argentins au nom de ses parents. Bouleversée, elle se lance dans une quête sur les origines de ses parents et part d’abord en Espagne. Mais est-elle prête à voir ou à accepter la vérité. Pas cette fois-là en tout cas.
Secrets de famille
Elle rentre à Paris et se noie littéralement dans le travail. Elle éteint tout sentiment et fonctionne comme un robot. Sarah Barukh décrit les mécanismes du burn out et c’est effrayant mais tellement réaliste. Voilà un autre thème fort du roman. Puis son corps se met à exprimer tout ce qu’elle refuse d’accepter. Le corps parle et évacue tout ce mal-être qui la ronge et ce déni.
Sophie n’a plus le choix, elle doit affronter les secrets de famille et lever le voile sur cette histoire familiale.
En parallèle, on suit à Buenos Aires, la vie de Nahuel qui lui aussi se bat avec son histoire familiale. Second enfant, il a toujours eu l’impression que sa mère ne s’était jamais remise de la disparition d’une soeur aînée. Oui mais voilà, Sol a sombré depuis fort longtemps dans l’alcoolisme pour noyer son chagrin et anesthésier sa douleur.
Sarah Barukh aborde alors l’histoire de ces centaines de bébés volés à des familles pauvres et démunies pour être confiés aux plus fortunés, sous la dictature argentine. Une période sombre à la fin des années 70 et début des années 80 qui déchirât bien des familles. Depuis cette époque, des femmes, regroupées en associations lutter pour faire connaître la vérité et tentent de retrouver les enfants disparus. D’autres associations traquent les criminels du régime dictatorial pour les faire condamner.
Les ravages de la dictature en Argentine
Le personnage de Nahuel nous permet de lever le voile sur cette tragique période. Avec Nahuel et Sol, Sarah Barukh nous emmène dans la souffrance mais aussi vers un combat où l’un ne baisse jamais les bras pour trouver la vérité.
Puisque le soleil brille encore a le mérite de décrire avec justesse les souffrances, le climat de peur, les déchirements qu’ont subi de nombreux Argentins. Évidemment, le roman est alors empreint de multiples émotions et la plume de Sarah Barukh sait retranscrire toute la pudeur des uns, le malaise des autres, bref une ambiance difficile.
Ce roman est vraiment très poignant. L’histoire de Sophie, Nahuel et Sol bouleversante. Au-delà de cette quête de la vérité, le roman fait aussi à la part belle à la maternité un thème cher à l’auteure. Bref, un sublime roman que je vous recommande.
Quatrième de couverture
Depuis l’enfance, Sophie s’est efforcée de ressembler à son père qu’elle admire. À presque quarante ans, elle a tout sacrifié à sa brillante carrière d’avocate, sa fille, son couple, ses amis. Toujours sur le fil, elle gèreses contradictions au prix d’étranges obsessions. Mais quand son père meurt brutalement, Sophie se brise. Son univers finit de s’effondrer lorsqu’elle trouve des passeports argentins aux noms de ses parents en vidant leur appartement.
À Buenos Aires, une femme noie dans l’alcool un passé insoutenable. Son fils la porte à bout de bras mais, brisée par la dictature, Sol ne se remet pas du secret qu’elle porte depuis bientôt quarante ans…
La fiche du livre
- Paru le 5 mai 2021
- Éditions Calmann-Lévy
- 130 x 210 mm
- 336 pages